La révolution du poker est venue des joueurs eux-mêmes. Lassés de l’impasse du jeu ou le plus riche gagne, ils voulurent savoir lequel d’entre eux étaient vraiment le meilleur joueur de poker, indépendamment de la fortune de chacun et désigner celui qui maniait le jeu dans toutes ses subtilités.
L’idée de la compétition est née de la volonté de se distinguer en tant que joueur et rien d’autre !
En sortant de l’univers étriqué des jeux d’agent, le poker allait révéler ses qualités et séduire la planète.
1Des règles qui ne favorisent plus les riches
Pour être précis, deux modifications importantes des règles du « poker à l’ancienne » ont décidé du succès. Désormais, dans un tournoi les joueurs commencent la partie avec le même nombre de jetons et sont éliminés s’ils n’ont plus de jeton.
C’est le principe même de la « compétition », contrairement au « jeu d’argent » qui permet de racheter des jetons et de revenir à la table… et ainsi de suite…
En compétition, on ne peut pas perdre plus que le prix d’inscription de départ et le but est d’être le dernier joueur à la table avec devant soi tous les jetons de ses adversaires. L’élimination (la mort du joueur ! ) est une sanction terrible qui crée une pression vive en émotions et cela n’empêche pas une notion de gain motivante, psychologique (avoir vaincu tous ses adversaires) et/ou financière (la somme des inscriptions de chacun).
Enfin, une partie des cartes qui compose le jeu est commune et visible par tous, contrairement au poker « fermé » dans lequel on ne connaît aucune des cartes de ses adversaires. Ne plus jouer complètement en aveugle rend la pratique plus technique, avec seulement 2 inconnues sur 7 cartes disponibles, les devinettes deviennent subtiles et les mises un langage.
2Tous les « ingrédients du jeu » à haute dose
La qualité principale du poker est d’être un jeu complet, riche de tous les « ingrédients du jeu » tels que le sociologue et philosophe Roger Caillois les a définis (cf « Les Jeux et les hommes » de Roger Caillois, éd. Gallimard). Soit Compétition, Aléa, Simulacre et Vertige :
* Le poker est un jeu d’attaque, de confrontations techniques et psychologiques. En ce sens c’est un jeu de compétences, qui permet au plus talentueux de faire reconnaître leur supériorité en compétition.
* En même temps, c’est un jeu de hasard, celui des cartes. Si la compétence tend à le réduire, elle ne l’exclue jamais, le joueur jongle avec les probabilités Qui n’a jamais vu sortir la seule carte qui pouvait sauver son adversaire ? Mais n’est-ce pas ce hasard qui permet de voir l’avantage passer d’un joueur à l’autre et changer de camp plusieurs fois lors d’un même coup de poker et qui le rend si spectaculaire à en faire littéralement vibrer les joueurs ?
* Alors, pour éviter de s’en remettre au hasard, il faut battre ses adversaires psychologiquement et gagner le coup avant d’avoir à montrer ses cartes ; c’est pourquoi le joueur de haut niveau se fabrique un personnage, une stature, un simulacre visant autant à déstabiliser qu’à se rendre « illisible ».
Ainsi, les tournois de poker sont des réunions d’acteurs aux styles très variés, tous perturbant d’une manière ou d’une autre et qui visent à provoquer des erreurs chez leurs adversaires. Sans aller jusqu’à comparer avec le catch, constatons que tous ces personnages sont également télégéniques…
* Enfin, comme la défaite est le lot partagé par tous sauf un, la frustration des perdants renforce d’autant le vertige de la victoire sur tous !
Les jeux qui traversent le temps et l’espace sont souvent très fortement dotés d’au moins un de ces ingrédients, le poker possède les quatre en grande quantité !
3« Cinq minutes pour apprendre les règles, une vie pour les maîtriser »
Enfin le poker est un jeu très accessible, les règles sont simples, les débutants éprouvent rapidement les joies du bluff, d’où l’adage : « Il faut cinq minutes pour apprendre les règles du poker et une vie pour les maitriser ! »
Car derrière cette apparente simplicité des règles, on découvre un univers complexe fait de techniques de jeu, de codes, de simulation…
Ainsi, nous observons une nouvelle « discipline » s’installer, une discipline « ludique », comme il y a des disciplines « sportives », avec son circuit de compétitions hiérarchisées, ses vedettes médiatisées, ses clubs d’anonymes, ses médias spécialisés… son jargon !
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